Les limites du marketing
D’un modèle périmé…
« Le marketing va mal ». C’est Philip Kotler lui-même qui en fait le constat*, rappelant que « 75% des nouveaux produits, services ou créations d’entreprises sont voués à l’échec » en raison d’erreurs manifestes de stratégie marketing. Matt Haig en a fait une compilation savoureuse dans son ouvrage 100 grands flops des grandes marques (Dunod, 2011). Un exemple ? Coca Cola lance son New Coke après des millions de dollars investis dans des études, tant sur les attentes des consommateurs que du meilleur positionnement prix/distribution. Pour un résultat catastrophique – le produit disparaît en trois mois.
Mais Coca Cola est loin d’être un cas isolé. La fréquence et la variété des échecs sont si nombreux, du lancement raté à la campagne décevante, que l’expression « c’est du marketing » a pris une connotation péjorative – c’est faux, c’est artificiel. Cette situation ne peut s’expliquer que par une défaillance du modèle traditionnellement utilisé pour concevoir ces stratégies.
Pourquoi ? Le modèle marketing traditionnel a été créé à une époque où l’on était convaincu que les comportements des décideurs ou consommateurs pouvaient être modélisés, qu’ils étaient aussi prévisibles que le calcul d’une trajectoire. Etant donné ce que m’a révélé mon étude de marché sur le comportement de mes cibles, si je vends mon produit A à tel prix via tel réseau, je réaliserai tel chiffre d’affaires.
* Les 10 péchés mortels en marketing, Editions Maxima, 2007.
… à un nouveau modèle
Problème : les cibles sont des êtres humains. Leur comportement n’est pas toujours logique. Il l’est même de moins en moins car l’environnement est toujours plus complexe, changeant, multiforme. Aujourd’hui, un décideur peut recevoir des impulsions opposées (messages publicitaires, commentaire d’un ami, note interne dans une entreprise) qui le font changer plusieurs fois d’avis en un instant.
Plus important encore : la notion même de cible devient floue. La ménagère de moins de 50 ans prend de plus en plus l’avis de ses enfants, eux-mêmes influencés par leur communauté Facebook. De même en B2B, rares désormais sont les acheteurs qui agissent indépendamment leur environnement (collaborateurs, collègues, conseils …). Voilà qui fausse les hypothèses trop simples du modèle marketing traditionnel, inapte à traduire l’irrationalité du marché comme composante réelle du business.
Or, il existe un domaine de connaissances qui présente de troublantes similarités avec cette situation. Ce domaine, c’est celui des sciences physiques. Et de fait, à bien y regarder, le comportement du consommateur ou du décideur B2B ressemble étrangement à celui d’une particule dans le monde de l’infiniment petit.
Le chemin vers le Marketing Quantique
De la physique quantique ...
Au début du XXe siècle, le monde des sciences est en ébullition. Les instruments de mesure se sont considérablement perfectionnés (télescopes, microscopes). Et surprise, certaines observations, celles qui portent sur les objets infiniment petits, les particules, remettent radicalement en cause les Lois de Newton, pourtant à la base de la physique depuis leur publication en 1687.
Ainsi l’étude par Max Planck de la quantité d’énergie émise par des ampoules électriques conduit-elle à la conclusion que les électrons libèrent de l’énergie par paquets, les « quantas » (d’où le nom de mécanique quantique), ce qui suggère une discontinuité dans la trame de l’espace (une théorie illustrée bien plus tard par le film « Matrix » de Lana et Andy Wachowski). D’autres découvertes montrent que chaque particule qui nous constitue peut adopter plusieurs états à la fois, mais qu’elle « choisit » son état si on l’observe. Ou encore que certaines sont intriquées entre elles – toute modification de l’une modifie instantanément l’autre, même si elle est située à l’autre bout de l’univers, et ce plus vite que la vitesse de la lumière.
Vous avez dit bizarre?
… au marketing quantique
Comportement étrange, certes, et néanmoins bien réel, prouvé par les expériences. Parce qu’ils ont accepté cette étrangeté, puis qu’ils en ont démonté les mécanismes, les physiciens quantiques sont à l’origine de la création de quelques-unes des inventions les plus utilisées de nos jours : le laser, le transistor (au cœur de tout objet électronique, à commencer par votre ordinateur), le GPS, les appareils d’IRM, les cellules photoélectriques qui ouvrent toutes les portes automatiques du monde entier… Plus d’un tiers du PNB des pays développés reposerait sur des technologies issues de la mécanique quantique. Pour Thierry Breton, CEO d’Atos, 3e société informatique mondiale, en matière informatique « la génération qui arrive, c’est celle de l’ordinateur quantique ».
Or, la mécanique quantique semble aussi s’adapter à ces particules élémentaires du marché que sont les décideurs. Dans les pages suivantes, nous allons mettre en parallèle 5 grands principes de la mécanique quantique (intrication, quantification, indétermination, superposition, non commutativité) avec le comportement d’un prospect. Pour chacun, nous présenterons d’abord les limites de la pensée marketing classique, corroborée par un expert ; puis nous exposerons le principe quantique et notre recommandation d’application à la stratégie marketing.
Ces parallèles ne forment pas un système de pensée complet. A ce stade, nous ne prétendons pas refonder le modèle du mix marketing, mais introduire de nouvelles variables et susciter le débat. Nous souhaitons aussi soulever le voile sur l’extrême complexité de la modélisation d’une stratégie marketing. Ou, pour paraphraser Richard Feynman, prix Nobel en 1965 pour ses travaux sur la mécanique quantique : « Je crois pouvoir affirmer que si vous croyez comprendre le comportement d’un décideur, c’est que vous ne le comprenez pas ».
Richard Feynman
Prix nobel de Physique
« La théorie quantique décrit la Nature comme une absurdité du point de vue du bon sens. Et cela correspond tout à fait aux observations expérimentales. »
Albert Eistein
Prix nobel de physique
« L’idée qu’un électron exposé à un rayonnement choisit en toute liberté le moment et la direction où il sautera m’est insupportable. S’il en est ainsi, j’aimerais mieux être cordonnier. »
© GetQuanty