Atos, leader international des services numériques, lance « Atos Quantum », un ambitieux programme visant à développer des solutions de calcul quantique qui offriront des puissances de calcul inédites, dans les domaines de la sécurité, le monde médical, et pourquoi pas le marketing quantique ? En effet, La première révolution quantique, menée au début du XXème siècle par les jeunes Européens qu’étaient Einstein, Heisenberg, Pauli ou Schrödinger, a donné naissance au fil des années à des inventions majeures comme la supraconductivité, le transistor, le laser, la communication sur fibre optique, l’IRM ou encore le GPS.
Thierry Breton, Président-directeur général d’Atos, a déclaré :
« Aujourd’hui, forts de notre expertise et de notre savoir-faire dans les supercalculateurs et la cyber-sécurité, nous nous engageons pleinement dans la seconde révolution quantique qui va bouleverser dans les décennies à venir tous les secteurs d’activités de nos clients, de la médecine à l’agriculture en passant par la finance ou l’industrie. C’est une véritable aventure collective, humaine et technologique qui s’ouvre devant nous. Ceux qui ont aimé la transformation numérique vont se passionner pour la révolution quantique ! »
PS ; Nous remercions Thierry Breton d'avoir fait l'effort de communiquer en Anglais (;-) dans cette vidéo de lancement de Atos quantum.
L’informatique quantique devrait permettre, dans les décennies à venir, de faire face à l’explosion des données qu’entraînent le Big Data et l’Internet des Objets. Elle devrait également favoriser de nouvelles avancées dans le deep learning et l’intelligence artificielle.
Perspectives d'un avenir quantique
Entretien tiré du Magazine d'Atos http://atos.net/ascent-magazine avec les leaders mondiaux en matière de recherche quantique,sur le formidable champ de possibilités offert par l'informatique quantique.
- Alain Aspect, Professeur à l'Institut d'Optique Graduate School et à l'Ecole Polytechnique, Université Paris-Saclay;
- David DiVincenzo, Professeur à la fondation Alexander von Humboldt, Directeur de l’Institut d’Informatique Quantique à l’Université Technique de Rhénanie-Westphalie à Aix-la-Chapelle, Directeur de l’Institut de Nanoélectronique Théorique au Centre de Recherche Juelich ;
- Artur Ekert, Professeur de Physique Quantique à l’Institut de Mathématiques de l’Université d’Oxford, Professeur et Directeur du Lee Kong Chian Centennial, du Centre de Technologies Quantiques de l’Université Nationale de Singapour ;
- Daniel Estève, Directeur de Recherche au CEA Saclay, Directeur de Quantronique ;
- Serge Haroche, Professeur honoraire au Collège de France, Prix Nobel de Physique ;
- Cédric Villani, Professeur de l'Université de Lyon Claude Bernard, Directeur de l'Institut Henri Poincaré CNRS/UPMC, lauréat de la Médaille Fields.
La deuxième révolution quantique verra l'émergence de l'informatique quantique. À quoi servira-t-elle?
Cédric Villani: Pendant des décennies, nous avons assisté à une augmentation exponentielle de la capacité et de la vitesse du traitement informatique, selon la loi de Moore. Mais à un moment ou un autre, cette croissance va s'arrêter. Si nous voulons progresser, nous devons utiliser d'autres types de physique; et cela passe par le monde quantique.
AlainAspect: J'ai passé ma vie à observer les propriétés les plus fascinantes du monde quantique et parfois à les reproduire dans mon laboratoire. Pourquoi avons-nous besoin du calcul quantique? Tout simplement parce qu'il existe. L'univers recèle ces propriétés fantastiques et quand un outil est disponible, les gens finissent par l'utiliser.
CV: Il y a aussi une dimension d'exploration et un facteur curiosité: la science est si intéressante et si stimulante!
Philippe Duluc: Nos clients doivent jongler avec de plus en plus de données et ont besoin d'une puissance de calcul accrue pour pouvoir les explorer. C'est pour cela qu'Atos a décidé d'investir dans l'informatique quantique.
Pourquoi la capacité de calcul quantique est-elle tant attendue?
PD:Les entreprises sont habituées à ce que la puissance de calcul croisse en fonction de la loi de Moore. Elles souhaitent que cela continue. Les scientifiques ont aussi besoin d'ordinateurs beaucoup plus puissants que ceux dont nous disposons aujourd'hui.
CV: Ce n'est qu'à partir des années 1980, lorsque suffisamment de ressources de calcul ont été disponibles, que les physiciens et les astronomes ont pu confirmer que le système solaire était chaotique. Avant cela, nous débattions uniquement entre théoriciens. Nous revoilà à la veille d'une révolution ouvrant de nouvelles voies grâce au calcul.
AA: Le concept de calcul quantique a été proposé pour la première fois par Richard Feynman, physicien théoricien américain et lauréat du prix Nobel en 1982. Feynman a étudié le problème des électrons interagissant les uns avec les autres sur de la matière. L'espace mathématique concerné est incroyablement vaste. Traiter ce problème à l'aide d'un ordinateur classique est tout simplement inconcevable. Selon Feynman, la seule façon de le traiter consiste àrecourir à du matériel quantique.
PD: Chaque fois que vous ajoutez un paramètre à ce type de calcul, vous doublez la puissance que vous utilisez pour une simulation. Mais ces problèmes sont beaucoup plus simples à traiter avec un ordinateur quantique.
Nous apprécions les avantages de la première révolution quantique, aussi bien dans le cadre professionnel que personnel. Comment les données quantiques bénéficieront-elles à notre monde ?
AA: L'histoire a démontré que les personnes ayant fait une découverte anticipent très rarement ses applications réelles. Et comme pour toute découverte, il peut y avoir aussi des conséquences négativesselon l'usage que l'on en fait.
PD: La physique quantique ouvre la voie à un nouveau domaine de la communication quantique, qui offre une communication sans faille. La communication quantique pourrait sécuriser le partage d'informations, grâce à la cryptographie quantique. Ceci est lié au principe d'incertitude de Heisenberg: il est impossible de
copier des données encodées en mode quantique, car le simple fait de les observer change leur mode.
AA: C'est l'un des domaines que nous commençons à explorer, mais je doute que nous soyons conscients des bénéfices possibles. Regardez l'histoire du laser. Je suis sûr que ses inventeurs n'avaient pas prévu que sa découverte nous permettrait de lire les codes-barres des produits au supermarché.
CV: Nous ne savons vraiment pas, et c'est là le point clé. L'histoire de l'humanité regorge d'exemples d'idées commerciales et d'applications technologiques qui se sont concrétisées bien après leur invention ou la naissance même du principe originel.
PD: Pour le programme quantique d'Atos, la première étape a consisté à programmer des algorithmes quantiques et à les tester avec un ordinateur traditionnel. La deuxième étape pourrait être la simulation quantique, nécessitant moins de bits quantiques. Nous travaillerons avec des chercheurs mais aussi avec différents secteurs d'activité.
AA: Je pense que c'est formidable que des entreprises comme Atos cernent le potentiel de la technologie quantique, car le retour sur investissement pour les en-treprises ne se matérialisera pas de sitôt.
L'Intelligence Artificielle (IA) est citée parmi les domaines qui seront bouleversés par l'informatique quantique. Partagez-vous cette hypothèse?
CV: Il n'est pas encore établi si, ni comment, le calcul quantique affectera le domaine de l'IA. Le calcul quantique signifie un accroissement de la puissance, ce qui est bon pour les processus subtils. Mais les technologies d'IA les plusrépandues reposent sur un grand nombrede données et un accès répété à ces données. Il y a quelques problèmes fondamentaux dans la mise en œuvre des algorithmes connus dans ce contexte quantique.
Comment la technologie quantique va-t-elle changer la vie de tout un chacun d'ici 2025?
AA: Le grand public ne remarquera probablement pas de changement notable au quotidien. Grâce à la technologie quantique, nos ordinateurs seront plus rapides et nos communications plus sûres; mais les gens sont habitués à ce genre de progrès depuis deux ou trois décennies. Lorsque le Deep Learning et l'IntelligenceArtificielle nous permettront véritablementde résoudre des problèmes que nous ne cernons pas encore à l'heure actuelle, cela pourra avoir un impact sur notre quotidien.
CV: Il peut y avoir un délai considérable entre l'émergence d'un nouveau concept et le moment où il modifie nos habitudes. Une révolution ne se présente jamais seule. Aujourd'hui nous pouvons bénéficier de la technologie quantique grâce aux progrès réalisés dans d'autres domaines. Il est essentiel d'appréhender ce phénomène comme l'une des innombrables mailles d'un filet.
PD: N'oublions pas que 2025 approche à grands pas. D'ici là, nous serons peut-être en mesure de simuler de plus grandes molécules. Mais pour le grand public, les impacts ne se ressentiront que quelques années plus tard.
CV: Dans ce domaine, personne ne peut prédire ce qui se passera dans cinq ans. Des changements considérables peuvent se produire pendant ce laps de temps. Il y a cinq ans, il n'y avait pas de concepts
autour du Deep Learning. Désormais, tout programme d'IA qui se respecte dispose d'une composante Deep Learning significative. Personne n'aurait pu prévoir cette réalité.
AA: Il est difficile de faire des prédictions, surtout à propos de l'avenir. Nous savons qu'il est peu probable que nos prévisions s'avèrent justes, mais cela reste un exercice très utile. En affirmant «c'est ce
que nous voulons faire», nous pourrons, au fil du temps, percevoir le moment où nous réaliserons une véritable avancée. Et cela se produira lorsque nous nous écarterons du chemin initial